Des nouvelles de la bataille entre Airbnb et les mairies

Des nouvelles de la bataille entre Airbnb et les mairies

Le 17 Janvier dernier, le tribunal de grande instance de Paris a rendu son verdict sur l’affaire opposant la ville de Paris a la société SCI panorama immobilier : c’est un jugement d’importance pour Airbnb ; et surtout pour les propriétaires parisiens louant des appartements via la plateforme.

L’affaire est complexe : la ville de Paris porte plainte contre l’entreprise SCI panorama immobilier, arguant que cette dernière ne respecte pas la Loi du 6 Juillet 1989 du code de la construction et de l’habitation. Entre autres, cette loi dispose que tout changement de destination d’un logement secondaire, de la location longue durée au meublé de tourisme par exemple, doit entrainer au préalable une déclaration en mairie. C’est aussi cette loi qui met en place le système de compensation des surfaces : tout mètre carré sortant du circuit locatif principal, par exemple pour le marché du tourisme, doit être compensé avec de nouveaux mètres carré entrant sur le circuit principal. En clair : l’entreprise a loué des logements sur Airbnb sans informer la mairie du changement de destinations des biens. Donc : la mairie porte plainte (a priori, comme l’entreprise n’a pas informé du changement de destination des appartements, elle n’a pas mis en place la compensation obligatoire, un point toutefois qui n’est pas explicite dans l’ordonnance du TGI). Surtout la Ville réclame le payement de 50 000 euros d’amende pour non-respect du droit. Et c’est là l’un des nœuds du problème. Si l’entreprise ne conteste pas les faits, elle demande tout de même un sursis dans le paiement de l’amende ; avec pour argument que la cour de Justice de l’Union Européenne a été saisie sur une question proche. Gardant ainsi l’espoir de voir son amende annulée si le droit national est jugé par la CUEJ comme incompatible avec le droit de l’UE.

En fait ce n’est qu’une nouvelle escarmouche autour de la bataille entre les plateformes de locations et les grandes métropoles Européennes. Il suffit de revoir la plainte déposée auprès de la commission Européenne par 13 villes ou régions européennes le 10 Octobre 2018.

Plus exactement, c’est une bataille qui s’est déplacée des cadres nationaux vers Bruxelles. Toutes les grandes villes Européennes ou presque ont mis en place des réglementations directement liées à l’activité d’Airbnb : à Paris, il est impossible de louer son appartement plus de 120 jours (avec des nuances selon que le logement est résidences principales/secondaires), et il faut demander un numéro d’enregistrement auprès de la Mairie (conséquence du fameux « décret Airbnb » signé en 2016 pour appliquer la loi pour « une république Numérique »). A Amsterdam, au 1er Janvier 2019 la limite passe à 30 jours de locations par an et par appartement. Evidemment toutes ces mesures sont critiquées par la plateforme, il suffit d’écouter les dires de M. Aurélien Pérol, en charge de la communication de la plateforme, et dénonçant un « lobbying des syndicats des services Hôteliers ». A noter que Aurélien Pérol connait bien la législation pour avoir travaillé pour l’administration l’ayant mise en place. Il travaillait au cabinet de la secrétaire d’état chargé du numérique de l’époque, Mme. Axelle Lemaire. Face à cette multiplication des règlementations Airbnb s’est donc tourné vers Bruxelles.

C’est notamment ce qu’explique un communiqué de Presse de l’entreprise daté du 24 Janvier 2019 : « la commission Européenne a annoncé aujourd’hui (NB : toujours selon le communiqué de l’entreprise) le lancement d’une enquête pour déterminer si la lourde procédure d’enregistrement imposée aux locations meublées touristiques dans la ville de Bruxelles contrevient à la règlementation européenne ». L’entreprise dénonçant notamment des règles locales « lourdes » et « disproportionnées ». Et en effet, la capitale belge semble bien être à la pointe de la réglementation sur le marché des meublées touristiques : obligation de déposer un dossier en mairie, avec par exemple une attestation de sécurité incendie obligatoire, un numéro d’enregistrement, une limite de 90 jours de locations par an/appartements… Si ces réglementations sont jugées contraires aux droits de l’Union, elles le seront logiquement dans tous les états appliquant des règles proches, l’amende de la société parisienne SCI panorama immobilier pourrait bien être alors annulée.

L’un des autres problèmes mis en avant par cette ordonnance du Tribunal de Grande Instance de Paris reste bien la difficile verbalisation des fraudeurs par les Mairies, alors que ces dernières manquent déjà de moyens de coercition pour faire appliquer réellement la loi. Malgré une somme record d’amendes en 2018, avec plus de 2 millions d’euros demandés aux propriétaires fraudeurs par la Mairie de Paris, plus de 80% des annonces seraient toujours dans l’illégalité et ne donneraient pas, entre autres, leurs numéros d’enregistrement (chiffre avancé par une enquête menée par Le Figaro). C’est donc un triple coup dur pour la mairie : - échec d’une de ses offensives - qui va permettre à toutes les amendes en cours de trouver un sursis - et échec d’une de ses réglementations, mise en standby par l’UE, alors même qu’elle peine déjà à faire appliquer la loi. Evidemment, la mairie ne compte pas en rester là. Ian Brossat, adjoint au logement à la Mairie de Paris, et par ailleurs auteur du livre « Airbnb ou la ville ubérisé », prépare déjà une nouvelle action : « une plainte contre les plateformes, qui ne respectent pas la loi ».

La suite au prochain épisode...

[HospitalityOn]
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