La classification des licences
L’activité des débits de boissons est subordonnée à la détention d'une licence d’un niveau correspondant à la nature des boissons qui y sont commercialisées. Un exploitant ne peut donc proposer à la vente des boissons alcooliques que s’il est titulaire d’une licence.
Suivant le mode de vente de l’établissement et la nature des boissons proposées, différentes catégories de licences de débits de boissons peuvent être délivrées.
Les débits de boissons à consommer sur place
Définition généraleL’article L. 3331-1 du Code de la Santé Publique, modifié par la loi n°2011-302 du 22 mars 2011 puis par l’ordonnance n° 2015-1682 du 17 décembre 2015, classe les licences des débits à consommer sur place en deux catégories :
- Licence 3ème catégorie, licence 3, ou « licence restreinte » : autorise son détenteur à vendre les boissons du 1er groupe et les boissons du 3ème groupe ;
- Licence 4ème catégorie, licence 4 ou « grande licence » ou « licence de plein exercice »: autorise son détenteur à vendre les boissons de l’ensemble des groupes définis à l’article L. 3321-1.
La licence 1ère catégorie, licence 1, ou « licence de boissons sans alcool », qui autorisait son détenteur à vendre uniquement des boissons du premier groupe, a été supprimée par la loi du 22 mars 2011 (disposition entrée en vigueur le 1er juin 2011).
La licence de 2ème catégorie, licence 2, ou « licence de boissons fermentées », qui autorisait son détenteur à vendre des boissons des 1er et 2e groupes, a été supprimée par l’ordonnance n° 2015-1682 du 17 décembre 2015 (en même temps qu’ont été supprimées les boissons du 2e groupe) dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2016. Par une disposition non codifiée figurant au II de l’article 21 de l’ordonnance, les licences II existant au 1er janvier 2016 deviennent de plein droit des licences III – sans, donc, que les titulaires de l’ancienne licence II aient de formalité à effectuer.
Les licences restaurant
Définition généraleLes restaurants qui ne sont pas titulaires d’une licence de débit de boissons à consommer sur place doivent, pour proposer à la vente ou offrir des boissons alcooliques, être pourvus de l’une des licences visées à l’article L. 3331-2 du Code de la Santé Publique :
- la « petite licence restaurant » qui permet de vendre, pour consommer sur place, les boissons du 1er groupe et les boissons du 3ème groupe à l'occasion des principaux repas et comme accessoires de la nourriture ;
- la « licence restaurant » qui permet de vendre, pour consommer sur place, les boissons des groupes 1 à 5 à l'occasion des principaux repas et comme accessoires de la nourriture.
La jurisprudence a estimé que le restaurateur non titulaire de la licence IV qui sert des boissons non autorisées en dehors du service des repas, et pas seulement à l’occasion et comme accessoire de la nourriture, commet le délit d’ouverture illicite de débit de boissons : Cass. crim. 15 novembre 1966, Bull. crim. n° 257.
Les deux conditions sont donc cumulatives : le restaurant titulaire de l’une des licences de l’article L. 3331-2 ne peut délivrer des boissons alcooliques à ses clients qu’à l’occasion des principaux repas et comme accessoire à la nourriture.
- À l’occasion des principaux repas :
cette première condition s’apprécie en fonction des habitudes alimentaires. En France, il s’agit ainsi du déjeuner et du diner, voire du souper. Le petit-déjeuner ne constitue pas un repas principal : il a ainsi été jugé illégal pour un restaurant non titulaire d’une licence IV de servir un verre de rhum à sept heures du matin avec le petit déjeuner (Tribunal correctionnel de la Seine, 10 décembre 1932, Gaz. Pal. 1933, 1, 256). La Cour de cassation a précisé que doit être prise en considération, non pas l’heure des repas mais leur composition (Cass. Crim 14 novembre 1965, JCP 65, IV, 142). - Comme accessoire à la nourriture :
cette seconde condition montre que le critère essentiel est bien la composition des repas. La jurisprudence a ainsi écarté la qualité de restaurant, la boisson servie n’étant pas l’accessoire de la nourriture, à un établissement servant de l’alcool avec des sandwiches (Cass. Crim. 3 décembre 1936, S. 1938, 1, 158), avec des fruits (Cass. Crim. 17 mars 1953, D. 1953, 357 ; Cass. Crim. 25 mars 1955, JCP 55, IV, 77), ou avec des toasts (Cass. Crim. 28 novembre 1926, S. 1928, 1, 79 ; Cass. Crim. 3 décembre 1946, Gaz. Pal. 1946, 2, 219). Il convient toutefois de tenir compte de l’évolution des habitudes alimentaires : si le tribunal correctionnel du Havre, le 26 mai 1936 (Gaz. Pal. 1936, 2, 262) a estimé qu’un repas de crêpes ne constituant pas un véritable repas, une crêperie ne peut pas servir de cidre, cette interprétation apparaît aujourd’hui discutable. De même aujourd’hui, un fast food est incontestablement un restaurant.
Un restaurant n’est cependant pas tenu de servir les boissons alcooliques en même temps que le repas : elles peuvent être servies immédiatement avant (apéritif) ou aussitôt après (digestif) le repas. Les clients peuvent également prendre l’apéritif ou le digestif ailleurs qu’à table, par exemple au bar ou dans une dépendance du restaurant (patio, jardin) : il est en revanche interdit, lorsque le restaurant comporte une salle de café distincte de la salle de restaurant et que l’établissement ne dispose pas de l’une des licences prévues à l’article L. 3331-1 du Code de la Santé Publique (licence II, III ou IV), de servir une boisson alcoolique à un client ne prenant pas de repas : nous serions alors dans l’hypothèse de l’ouverture illicite d’un débit de boissons à consommer sur place évoquée ci-dessus (Cass. crim. 15 novembre 1966, Bull. crim. n° 257 précité).
S’agissant des bars à tapas, la question se pose légitimement de savoir si une licence à consommer sur place est nécessaire ou si une licence de restaurant est suffisante. Il convient d'examiner au cas par cas, en fonction de l'activité réelle de l'établissement. Certains d’entre eux, spécialisés dans ces produits, proposent un repas composé exclusivement de tapas, servis dans les conditions d'un restaurant « classique ». Face à un tel mode d'exploitation, une licence de restaurant est envisageable. En revanche une activité accessoire, façon « amuses-bouches », ne permet pas de considérer que les tapas sont délivrés à l’occasion d’un repas principal et comme accessoire à la nourriture : une licence à consommer sur place sera alors nécessaire pour délivrer des boissons alcooliques.
Les licences de vente à emporter
Définition généralePour proposer à la vente à emporter des boissons alcooliques, un établissement doit être pourvu d’une licence (article L. 3331-3 du Code de la Santé Publique).
L’établissement déjà titulaire d’une licence de débits de boissons à consommer sur place ou d’une licence de restaurant peut, de plein droit, proposer à la vente à emporter les boissons correspondant à la catégorie de sa licence.
A défaut de l’un de ces deux types de licence, l’établissement proposant de la vente d’alcool à emporter doit être pourvu d’une des deux licences suivantes :
- la « petite licence à emporter » qui comporte l'autorisation de vendre pour emporter les boissons du 1er groupe et les boissons du 3ème groupe ;
- la « licence à emporter » qui comporte l'autorisation de vendre pour emporter toutes les boissons dont la vente est autorisée.
Aux termes du dernier alinéa de l’article L. 3331-4 du Code de la Santé Publique, la vente à distance est considérée comme une vente à emporter. Les entreprises proposant ce service (notamment par l’intermédiaire d’Internet) doivent donc être pourvues d’une licence de vente à emporter. Si la délivrance des boissons est effectuée entre 22 heures et 8 heures, la formation spécifique mentionnée au 2ème alinéa de l’article L. 3332-1-1 du Code de la Santé Publique est obligatoire.
La licence temporaire
Le débit de boissons temporaire n'a pas fait l'objet d'une définition juridique.
Le Code de la santé publique contient cependant des dispositions spéciales pour ce type de débit. Il y a donc lieu, à partir du type de manifestations envisagées par ledit Code, de tenter d'en cerner les caractéristiques.
La jurisprudence est peu abondante sur la question. Il a été jugé que les débits temporaires visaient ceux qui étaient ouverts « à l'occasion d'une manifestation publique exceptionnelle d'un type bien déterminé, foire, vente ou fête publique ».
A contrario, la Haute juridiction ajoute que tel n'est pas le cas des « bals et spectacles organisés par l'intéressé en dehors de toutes fêtes patronales ou autres, à son profit exclusif ».
Constituerait ainsi un débit de boissons temporaire, celui dont l'activité est limitée dans le temps et dont la tenue est liée à une manifestation publique spéciale.
Une telle définition requerrait donc un cumul entre le critère de l'aspect temporel de la manifestation et le critère du caractère spécial de celle-ci dépourvue de régularité.
Le paramètre du temps pris isolément, c'est-à-dire la seule durée d'exploitation du débit, s'avère insuffisant. En effet, il est des débits exploités seulement pour une période limitée dans le temps ne constituant pas pour autant des débits de boissons temporaires : il en va ainsi des débits ouverts exclusivement de façon saisonnière, des marchands ambulants, ou encore de la buvette d'un théâtre servant des boissons à l'entracte.
Buvette temporaire dans une installation sportive
Dans une enceinte sportive (stade, salle d'éducation physique, gymnase, etc.), une association ne peut pas vendre ou distribuer des boissons alcoolisées.
Toutefois, des dérogations temporaires peuvent être accordées pour proposer des boissons alcoolisées du groupe 3 et pour 48 heures maximum.
Les associations concernées par les dérogations sont :
- Associations sportives agréées, dans la limite de 10 autorisations par an ;
- Associations organisatrices de manifestations à caractère touristique, dans la limite de 4 autorisations par an ;
- Associations organisatrices de manifestations à caractère agricole, dans la limite de 2 autorisations par an.
Les demandes de dérogation doivent être formulées au maire de la commune dans laquelle sera situé le débit de boissons au moins 3 mois avant la date prévue de la manifestation. Elles précisent la date et la nature de la manifestation prévue ainsi que les conditions de fonctionnement du débit de boissons (horaires d'ouverture, catégories de boissons concernées).
En cas de manifestation exceptionnelle, la demande peut être faite au moins 15 jours avant la date prévue.
Le non-respect de l'interdiction d'introduire par la force ou par la fraude dans une enceinte sportive des boissons alcoolisées fait encourir à l'association une amende de 7 500 € et un an de prison.
Buvette temporaire hors d'une installation sportive
Installation dans une foire ou expositionUne association peut ouvrir une buvette temporaire dans une foire ou une exposition et peut y servir tout type de boissons si :
- la foire ou l'exposition est organisée par l’État, une collectivité publique ou une association reconnue d'utilité publique ;
- elle a reçu un avis favorable du commissaire général de l'exposition ou de la foire ;
- elle a effectué au moins 15 jours à l'avance une demande d'ouverture d'un débit de boissons temporaire au maire de la commune concernée, ou à Paris, à la préfecture de police de Paris, accompagnée de l'avis favorable du commissaire général de l'exposition ou de la foire.
Une association peut ouvrir une buvette temporaire pour vendre des boissons du 1er groupe et des boissons du 3ème groupe à condition d'avoir obtenu l'autorisation du maire de la commune dans laquelle sera situé le débit de boissons à l'occasion :
- d'une foire, d'une vente ou d'une fête publique ;
- ou d'une manifestation qu'elle organise elle-même dans la limite de 5 autorisations annuelles.
Si la buvette temporaire est réservée aux adhérents (pot associatif, 3ème mi-temps, réception-buffet, etc.), il n'y a pas de démarche particulière à faire, ni de réglementation spécifique à suivre.